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Si rien avait une forme, ce serait celaDans la phrase de Victor Hugo, « si rien avait une forme, ce serait cela » face à l’immensité d’un ciel, réel et pourtant diffus, aux contours fuyants, Annie Le Brun trouve l’exacte impression de ce qu’elle ressent devant la vanité diffuse de l’art actuel. Cette grande spécialiste de Sade, d’Hölderlin et de Bataille, sait ce que la transgression suppose de courage, de liberté, de révolte, d’idéal. Qu’en reste-t-il dans cette surenchère permanente de l’obscène, du choquant, du toujours plus ?
De la révolte, Annie Le Brun en a à revendre dans cet essai brillantissime, difficile, somptueusement écrit qui interroge avec force notre époque à la lumière de ce qu’elle produit. La technique, le concept, la mode, le consensuel l’ont emportés sur la nécessité, l’éblouissement, le surgissement premier, véritablement créateur et sensible. Et il y a de quoi s’en inquiéter.

Annie Lebrun : Si rien avait une forme, ce serait cela, Gallimard, 2010

De la fraudePhilosophe et scientifique, Henri Atlan évalue en grand érudit le principe de la fraude, du mensonge boursier que nous avons connus. De manière éclairante, il exhume les liens entre monnaie, langage et sacré. De tout temps, objets et paroles d’échanges ont été investis symboliquement, ainsi en hébreu Onaa signifie à la fois léser en argent et en parole. Le Talmud permet une fraude à raison de 1/6e, au-dessous le vendeur indélicat est pardonné, au-dessus, il y a faute mais si le vol est de 1/6e exactement, on discute. Henri Atlan interroge cette tolérance pour le demi-mensonge à la lumière de l’ethnologie, de la philosophie, de la théologie, et de la science. La démocratie permet les demi-vérités –quand les dictatures elles, ne produisent que le mensonge absolu- mais ne les mettent-elles aussi pas en péril ? La pureté biblique n’étant plus de ce monde, la Raison tenant désormais lieu de Loi, où mettre le seuil de tolérance ? Ne dit-on pas qu’il ne faut pas prendre certaines paroles pour argent comptant ?

Henri Atlan : De la fraude, le monde de l’ONAA, La Librairie du XXIème siècle (Seuil), 2010

Pari de civilisationAbdelwahab Meddeb anime une émission hebdomadaire “Cultures d’Islam”, sur France-Culture. A l’heure où l’Islam offre de lui-même une image troublée, et où son développement en Europe pose la question des valeurs qui sous-tendent nos sociétés, il est salutaire d’entendre des voix qui prennent le contre-pied des idées reçues, et qui ouvrent la perspective d’une “cosmopolitique post-occidentale”. Car l’Islam peut s’accommoder de la modernité et se détourner de la sharî’a, dit Meddeb. Seule une avancée vers une forme de laïcité peut donner à l’Islam un nouveau souffle, en le débarrassant de cet archaïsme qui consiste à ne traiter les actes que de façon binaire (enfer/paradis) et en renouant avec ses propres Lumières. Référence intense est faire ici à Ibn Arabî et aux maîtres du soufisme, cette forme mystique et tout en nuances de l’Islam. Intellectuel franco-tunisien, Abdelwahab Meddeb prolonge ici la réflexion entamée, entre autres livres, dans “La maladie de l’Islam”, ou “Sortir de la malédiction”. A lire pour élargir son esprit…

Abdelwahab Meddeb : Pari de civilisation, Seuil, 16 €.