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L’année qui s’achève n’aura pas vu disparaître les grandes ombres qui planent sur une partie de la production littéraire, celle marquée par les totalitarismes et les guerres d’un siècle qu’on dit passé, mais qui marquent encore le présent. Quelques livres importants de l’année écoulée en témoignent : L’origine de la violence de Philippe Humbert (Editions Le passage), Paix de Richard Bausch (Gallimard), Le tombeau de Tommy d’Alain Blottière (Gallimard), le magnifique Des hommes de Laurent Mauvignier (Minuit), La confession négative de Richard Millet (Gallimard), La légende de nos pères de Sorj Chalandon (Grasset), Démon de Thierry Hesse (L’Olivier), ou le très beau prix Interallié 2009, Jan Karski de Yannick Haenel (Gallimard). C’est la guerre qui marque les hommes, et ses traces sont comme une grammaire pour les écrivains qui veulent raconter l’âme humaine.
On ne dira pas que leurs tentatives sont vaines. Ces livres sont souvent remarquables, et se souvenir de ce qu’ont vécu nos pères sert à construire le présent.
Mais ces récits ne sont pas seuls à évoquer ce XXe siècle qui ne nous quitte pas. Nous sommes continuellement dans un cycle de commémorations et de célébrations d’événements censés nous avoir sortis de cette aire de barbarie. A tel point qu’on peut s’interroger sur le sens réel de ces évocations.

detoledoUn petit livre, paru récemment dans la belle collection « La librairie du XXIe siècle » de Maurice Olender, en porte témoignage. Le hêtre et le bouleau est l’œuvre d’un jeune écrivain à la posture décalée, Camille de Toledo. Son projet d’écriture, qui tente de cerner par la fiction la position d’un français et d’un européen à la charnière du XXe et du XXIe siècle, comme il le dit dans une interview au nouvelobs.com, s’exprime ici dans une réflexion sur la célébration de la chute du mur de Berlin. L’histoire actuelle de l’Europe est marquée par le récit ininterrompu des crimes du dernier siècle, et par l’inertie mémorielle qui découle de cet acte fondateur de l’Union européenne : empêcher que ces temps de haine et de division ne reviennent. Et pourtant :
Le XXe siècle ne peut infiniment gouverner l’état émotionnel, philosophique et politique de l’Europe. Il ne saurait être à lui seul une pédagogie, une morale et une leçon d’éducation civique. Et cependant, faute d’une refondation poétique suffisante, nous ne parvenons pas à le quitter. Le passé de nos drames, par une puissante inertie des corps, des récits de la mémoire, des monuments, se perpétue et nous voilà, vivants, à l’orée du XXIe siècle, parmi tant de fantômes.
Comment donc entrer dans le siècle actuel ? Il n’y a pas de réponse, puisqu’à ce jour rien n’est joué. Il est certain que la littérature européenne porte les stigmates d’un passé non achevé. Question de génération peut-être. « Nous sommes là pour explorer le mal » disait récemment Luc Dardenne (Le Soir du 8 janvier). Comme lui, nous pensons que cette question du mal, qui est au centre de ces interrogations, est incontournable, et que la fiction, dans ce qu’elle peut en dire, reste essentielle.

C’est la rentrée…
Et comme chaque année, les rentrées littéraire et scolaire se chevauchent chez Graffiti.
On pourrait penser qu’elles s’opposent, les amateurs n’étant pas nécessairement les mêmes. Mais n’oublions pas que le livre scolaire acheté en librairie, est parfois la seule occasion pour certains de découvrir ce qu’est une librairie, ainsi que le service apporté par le libraire. Un premier pas, qui peut-être en entraînera d’autres, et qui dans de petites villes est souvent indispensable pour y assurer la présence de ce commerce dont une consœur libraire à Abidjan aime à dire : Une librairie est par essence, une activité à vocation culturelle et par nécessité pratique, une activité à responsabilités commerciales.


Livre scolaireLa façon dont le livre scolaire se diffuse en France depuis quelques années, est à cet égard révélatrice de l’incidence considérable qu’il peut avoir, en termes d’équilibre économique pour de petites entreprises de librairie. Partant du principe que le livre scolaire doit être gratuit, les régions françaises, qui en ont la charge, ont eu le choix entre deux options : grouper les achats chez les éditeurs ou d’importants grossistes, et les fournir directement aux écoles ; ou inventer un mécanisme, par chèques ou cartes à puces remis aux parents, permettant à ceux-ci de faire leurs achats en librairie. Dans le premier cas, une série de librairies de petites villes ont vu leur activité s’effondrer, et ces villes ont vu leur librairie disparaitre. Dans l’autre cas, c’est évidemment le maintien de l’activité qui a été assuré, et même si c’est dans un autre contexte, sans liaison avec le livre scolaire, l’histoire de Graffiti a démontré l’importance symbolique d’une librairie dans la cité, et le vide que crée son absence.

Il s’agit donc pour les lecteurs et les libraires de s’accommoder de l’encombrement causé par le livre scolaire durant la période de rentrée. Car en parallèle, c’est la rentrée littéraire qui nous excite. Certains la décrient, et c’est vrai qu’elle participe de la déferlante qui noie le lecteur, et de l’obsolescence de plus en plus rapide du livre. Cette rentrée 2009, c’est 656 romans et 313 essais et documents, sans compter les livres d’art, de cuisine, de jeunesse, de poche, de management, de tourisme et on en passe car la tête nous tourne…
Mais en même temps, quel plaisir de lire, de découvrir, d’échanger avec les lecteurs. Le métier de libraire, quoi…

La récente rencontre à la librairie avec l’éditrice Luce Wilquin et quatre de ses jeunes auteurs fut l’occasion de le souligner : la littérature reste le secteur phare de la librairie. Plus d’un livre sur quatre acheté chez Graffiti est un livre de fiction, qu’il s’agisse de littérature française ou traduite, de roman policier ou historique, de roman classique ou contemporain. Cette vitalité du roman et de la littérature en général est assez remarquable, puisqu’il s’agit d’un secteur éditorial en croissance : de 1995 à 2008, la part du roman dans la production des éditeurs français est passée de 15 à 23%. Graffiti fait donc un peu mieux encore, et si l’on y ajoute la part de la fiction dans le département jeunesse, les chiffres sont encore plus impressionnants.


Le lecteur a évidemment un peu de mal à s’y retrouver, dans cette profusion de titres qui recouvrent les tables de la librairie. Mais il sait en général tracer son chemin, s’aidant de critiques, de conseils, et du sixième sens qui appartient aux amateurs de livres. Les libraires sont là aussi pour y aider, et lorsque nous en avons le temps, nous enrichissons notre blog-lectures de petits commentaires. Sans prétention.
Nous ne pouvons donc que vous conseiller d’y jeter un oeil.