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Après le Nobel à Le Clezio, petites réflexions sur l’attribution des prix littéraires qui font chaque année l’objet, soit de polémiques, soit de commentaires sarcastiques ou désabusés…


En effet, durant des années, les grands éditeurs que sont Gallimard, Grasset, Le Seuil, ont été accusés, à juste titre peut-être, d’influer sur ces prix par le biais de leurs auteurs ou de leurs amis membres des jurys. Il est évident que la composition de ces jurys pose question, comme pose question de manière générale, dans la presse écrite, la position des critiques littéraires qui sont également écrivains, et donc attachés à des maisons d’édition.


On peut répondre que ces grands éditeurs ne sont pas devenus grands par hasard, et que parmi les livres qu’ils publient, en figurent d’excellents. Plus globalement, il nous semble cependant que l’évolution des prix depuis quelque temps, témoigne en filigrane du dynamisme du monde éditorial bien sûr, mais surtout d’une tendance très actuelle de la littérature elle-même.
Le monde éditorial ? A côté des éditeurs cités, d’autres ont fait leur apparition dans la liste des prix, comme Actes Sud, Minuit, L’Olivier, POL, récompensant un vrai travail d’éditeurs, qu’il faut saluer…


Quant à la littérature ? Regardez le palmarès du Femina, du Renaudot, du Médicis, voire du Goncourt… A côté d’effets d’opportunisme, on ne peut que se réjouir de voir y figurer Jean-Philippe Toussaint, Laurent Gaudé, Philippe Claudel, Régis Jauffret, Jean Echenoz… Mais ce qui nous semble vraiment important, et qui nous tient à coeur, c’est la littérature francophone venue d’ailleurs. Nancy Huston, Jonathan Littell, Alain Mabanckou, Andreï Makine, Dai Sijie, et cette année 2008, Atiq Rahimi (Goncourt), Tierne Monenembo (Renaudot), sont nés dans une autre langue que la langue française. Pour certains, c’est la langue du colonisateur, pour d’autres la langue d’un changement de vie, mais toujours une langue choisie pour l’écriture. Et pour Atiq Rahimi, afghan devenu français, ce fut, comme dit le journal Le Monde, la langue de la liberté.


sabourgoncourtTout cela, c’est du même ordre que l’élection d’Obama aux Etats-Unis. C’est le signe d’un monde qui s’ouvre aux autres, à l’ailleurs, au métissage, en un mot le monde de demain, n’en déplaise aux nationalistes identitaires qui sévissent un peu partout.
Et cette histoire qui avance peut manifester une certaine ironie, y compris en littérature. En 1989 fut créé à Paris le Prix Novembre, devenu depuis le Prix Décembre, en forme d’opposition au conformisme du Goncourt. Cet anti-Goncourt a souvent couronné d’excellents livres, et cette année c’est le formidable et impressionnant Zone, notre invité du 2 décembre qui l’a reçu. L’ironie de l’histoire ? Zone, ce « livre-monde » qui parcourt l’histoire du monde méditerranéen au prisme du vingtième siècle, et Singué Sabour, qui donne la parole à une femme afghane, l’un écrit par un français frotté de Moyen-Orient et de langues arabe et persane, et vivant à Barcelone, l’autre écrit par un afghan réfugié à Paris et cinéaste, auraient pu voir leurs prix inversés, en toute légitimité.
Goncourt, anti-Goncourt, (Obama), même combat ?